Historique St Michel du Pileu – Palaiseau
Texte rédigé par Olivier Berger, historien diplômé de Sorbonne-Université, 2019, mis à jour par l’équipe animatrice de St Martin-St Michel (2024), avec son aimable autorisation. Reproduction interdite.
L’église Saint-Michel est née des lotissements de banlieue et de la reconquête catholique de ces nouveaux territoires, précédant les chantiers du Cardinal Verdier. Elle est dédiée à l’Archange Saint-Michel.
Située dans un quartier excentré et étalé sur le territoire de trois communes (Igny, Massy, Palaiseau), l’église Saint-Michel est une réponse à l’absence de lieu de culte pour les nouveaux habitants du Pileu, comme l’église de Lozère dans le quartier du même nom. Cette église a une fonction religieuse, sociale et politique. Elle est d’abord une chapelle rattachée à la paroisse Saint- Martin, avant de devenir église paroissiale à part entière en 1967, lors de la création du nouveau diocèse de Corbeil-Evry, suite à l’éclatement de la Seine-et-Oise, dans le département de l’Essonne tout neuf.
Le projet est vraisemblablement une décision du diocèse de Versailles, en la personne de Monseigneur Gibier, projet suivi sur le terrain par l’Abbé Pierre Géan, curé doyen de Saint-Martin de Palaiseau. Suite au don du terrain par une famille pileusienne, la construction commence en septembre 1928 pour finir en décembre de la même année. Il est certain que le financement a été assuré par une souscription publique plus large que Palaiseau, par des dons anonymes, des subsides du diocèse ainsi que du mécénat de compétence (entrepreneurs accordant des rabais, journées de travail offertes par des ouvriers). C’est le 18 août 1929 que Saint-Michel est consacrée, ses cloches sont bénies en 1930 par Monseigneur Roland – Gosselin, évêque auxiliaire de Versailles. Une plaque dédicatoire est présente dans la nef.
Saint-Michel est de style Art Déco et adopte un plan en croix latine. On la doit à l’association de deux professionnels parisiens, l’architecte Louis-André Denis et l’entrepreneur Fabre, spécialisé dans les voûtes et la construction d’églises. Il s’agit d’un édifice fonctionnel, construit en matériaux modernes, la brique, le verre et le béton armé. Ses formes et ses volumes sont à la fois géométriques et symétriques, ce qui est typique du courant Art Déco. Celui-ci est né de l’exposition parisienne du même nom en 1925 et se répand dans les constructions notamment pour les bâtiments à usage collectif, églises comprises, ceci influence le style et les méthodes de construction, assurant le triomphe de l’architecture moderne. Le courant Art Déco cherche à valoriser la vitesse et la technique, c’est le triomphe de l’ère machiniste, exprimée dans la verticalité ou l’horizontalité.
A l’origine, les murs sont en béton brut, les créateurs de l’église se sont inspirés des chapelles balnéaires et des chapelles romanes, tout en adaptant la hauteur à un quartier pavillonnaire. Un clocher-mur en béton moulé est réinterprété dans un style très moderne avec les pans coupés, le dépouillement est voulu tout en évitant l’austérité, pour répondre à des critères d’économie. On notera les fenêtres de la nef imitant des baies en ogives, ce qui donne à l’église une forme de machine, en effet, ces bandes étroites ressemblent aux crevés de capot des automobiles contemporaines. Quant à la toiture, elle est assez traditionnelle avec ses tuiles mécaniques, contrastant avec les toitures en béton des chapelles absidiales et du chevet.
Une fois à l’intérieur de Saint-Michel, le fidèle se rend compte que les espaces traditionnels de l’église sont présents : porche, narthex surmonté d’une tribune, nef, chapelles absidiales dont l’une est une sacristie, chœur.
L’espace intérieur fait penser à une église-halle. Tout est conçu pour rapprocher les fidèles de l’autel où le prêtre officie.
Un regard sur les vitraux révèle leur composition simple en carreaux de verre géométriques, de formes, de textures et de couleurs variées, typiques du mouvement Art Déco. Les vitraux de la nef reprennent les symboles du blé et de la vigne renvoyant à l’Eucharistie et portent les noms de familles donatrices, ceux du chœur sont consacrés à l’Archange Saint- Michel terrassant Satan et pesant les âmes, de part et d’autre de la couronne du Christ-Roi. Sur la façade principale, entre les montants du clocher se dresse le plus ouvragé des vitraux représentant la Sainte-Croix. La lumière a un rôle important, elle crée des ombres changeantes selon les heures du jour à l’intérieur de la nef, avec le chevet toujours éclairé au sud, afin de produire un effet sur le fidèle que l’on cherche à séduire pour qu’il fréquente l’église de sa paroisse.
Quant au mobilier de l’église, il est classique. On notera la présence d’une statue de la Vierge à l’Enfant et de l’Archange Saint-Michel en plâtre de part et d’autre du chœur. Le baptistère a des décorations de mosaïques portant des symboles chrétiens, la mosaïque étant à la mode chez les bâtisseurs du mouvement Art déco. On y retrouve l’ancre, la croix, la colombe et le Sacré Cœur. Si le bénitier est aussi en mosaïque, il est une création récente d’une paroissienne. Dans le chœur, l’ambon en béton moulé est fixé dans le sol.
Grâce à la présence de l’église, le quartier ressemble à un village, les cloches produisent le même son depuis 90 ans pour rappeler à la population que le christianisme est présent au Pileu. Des liens verticaux et horizontaux se sont crées : entre Dieu et les hommes, mais encore, entre les hommes eux-mêmes, c’est ce que la croix peut symboliser. Dans l’esprit des promoteurs de l’église, la présence chrétienne devait protéger la population des mouvements subversifs marxistes, dans l’espoir que les habitants vivent dans un esprit de réconciliation et non de
division. Tous les Pileusiens apprécient leur église !
Une nouvelle phase de travaux a débuté en 2023 : démolition du presbytère (construit en 1965 et plus utilisé depuis de nombreuses années, ne répondant plus aux normes et devenu totalement insalubre), démolition de la « maison du gardien » (datant des années 30 et également inutilisée et insalubre), aménagement du terrain autour de l’église. A venir: la rénovation de la toiture de l’église, celle de l’installation électrique, de la sacristie et de la porte d’entrée !